Juan K, abréviation de Juan Kouyoumdjian, est connu dans le monde de la voile pour ses machines de course radicales comme le "Rambler 88", le "Skorpios" ou plus récemment le ClubSwan 80 "My Song". Le fait que le constructeur argentin, dont le studio se trouve à Valence, ait même présenté des plans pour un format flybridge avec quille pivotante, étonne de prime abord. Le slup en aluminium "Argo", long de 54 mètres et large de 9,60 mètres, n'a toutefois pas grand-chose à voir avec les voiliers à moteur. Il s'agit d'un projet commun avec Rob Doyle Design et le résultat d'un pitch que Juan K a probablement remporté grâce à son design de coque inhabituel.
La dynamique de la fissure résulte de l'orientation négative du saut de pont et de l'étambot. De plus, Juan Kouyoumdjian a travaillé un tumble-home, c'est-à-dire une courbure convexe sur toute la surface, dans le franc-bord, qui rappelle un peu l'époque IOR ou les flancs de coque rentrés des dernières générations d'Imoca et du ClubSwan 125. Cela diminue un peu la surface de pont, mais donne une stabilité de forme. Et c'est important pour les voiliers de cette taille. Car, comme le souligne Juan K, le moment de redressement provient davantage du poids propre que de la quille. Grâce à sa construction légère en aluminium - il s'agit de l'une des coques les plus légères sorties du chantier - "Argo", avec ses 264 tonnes, se déplace peu, en comparaison avec des formats de deux mètres plus longs de Perini Navi par exemple. Avec le même matériau de construction, ils atteignent 540 tonnes.
La quille est tout à fait importante sur "Argo", car elle s'abaisse à une profondeur de 9,50 mètres ( !). Cela améliore bien sûr les caractéristiques sous voiles, qui apportent en croisière 1.382 et 1.905 mètres carrés de surface au vent entre les ralingues. Le gréement slup est classique et devrait se passer de bôme à enrouleur. Les prévisions tablent sur douze degrés de gîte en mode croisière et 21 degrés de gîte en mode régate. C'est important, car tout mouvement de roulis est beaucoup plus extrême au poste de pilotage surélevé du flybridge qu'un pont plus bas. Lorsque la quille est relevée hydrauliquement, le tirant d'eau doit être légèrement inférieur à quatre mètres, ce qui permet par exemple d'entrer dans Saint-Tropez. De plus, l'aileron en acier inoxydable avec plomb ajouté, fabriqué par APM, n'empiète pas sur l'intérieur du bateau, comme c'est le cas avec les fûts internes des quilles relevables.
Reste la question des effets négatifs des quilles pivotantes sur les superyachts. Les coûts de développement sont élevés, car il faut toujours calculer la structure d'un éventuel échouement. Or, il n'existe aucune bombe de quille dans laquelle on pourrait intégrer une zone déformable. Juan K et son équipe ont donc fait preuve d'inventivité. Leur solution : un petit point de rupture pour le déblocage automatique du mécanisme de blocage. La tige de piston qui remonte la quille est bridée à un chariot dans lequel se trouvent quatre boulons. Leurs centres sont effilés et se brisent au contact du sol ou d'un objet. La quille cède et, dans le meilleur des cas, ne transmet aucune force transversale à la coque.
Comme dans toutes ses créations, Juan K a également doté le 54 mètres d'un détail visuel qui n'avait encore jamais été vu sous cette forme. Ainsi, la poupe est ornée en son centre d'une sorte de skeg auquel aucun gouvernail n'est accroché. Celui-ci existe en version double, loin à l'extérieur. Non, l'âme en V est destinée à réduire le battement en mer et dans la marina en cas de houle. En effet, le propriétaire de l'"Argo" a opté pour un layout avec une suite arrière qui, comme tous les espaces intérieurs, est conçue par Mark Whiteley.
Omikron Yachts travaille actuellement sur ce projet ambitieux sur le site d'Olympic Marine à Lavrio. Un projet gigantesque y a déjà été mené à bien : la conversion d'un croiseur compact en "Dream" de 106 mètres de long, qui a duré dix ans. Deux ans devraient suffire à l'achèvement de l'"Argo". Un autre client européen a commandé à Juan K les plans d'une version de 44 mètres de la quille pivotante, mais sans flybridge. Les travaux de soudure sur le kasko sont à nouveau effectués par Gouwerok à Aalsmeer, aux Pays-Bas, où une fois terminé, une deuxième coque de 54 mètres devrait être construite pour le chantier naval grec Omikron.