Décidément, on ne s'ennuie pas pendant les premiers jours de la Route du Rhum. Cette nuit, à 3h30, la direction de course a reçu la mauvaise nouvelle concernant Damien Seguin, qui a été percuté par un cargo, ce qui a immédiatement entraîné le démâtage de son Open 60. On ne sait pas encore exactement comment la collision s'est produite au milieu du golfe de Gascogne, ni si l'équipage du cargo s'est arrêté et a proposé son aide. Seguin n'a cependant pas été blessé et, peu après, il était déjà occupé à dégager les restes de son gréement afin qu'il ne cause pas d'autres dommages à la coque. Actuellement, son bateau se déplace lentement vers la terre ferme à une vitesse d'à peine 2,5 nœuds. Le sympathique Français, qui navigue avec un handicap car il lui manque la main gauche depuis sa naissance, est déjà le troisième à abandonner dans la classe Open 60, après que "DMG Mori" et "Oliver Heer Racing" soient entrés en collision hier et que les skippers aient dû rentrer à Saint-Malo.
Pour Boris Herrmann aussi, les choses ne vont pas encore très bien. Aujourd'hui, il s'est exprimé dans une vidéo depuis le bord et a fait part de problèmes avec le moteur, qui est important pour l'alimentation en énergie, ce qui peut en surprendre plus d'un, car il a été dit que "Malizia - Seaexplorer" ne dépendait pas du moteur pour la production d'électricité en raison des nombreuses surfaces solaires et des hydrogénérateurs. Mais ce sont justement ces hydrogénérateurs qui pourraient poser problème, car dans une phrase annexe, Herrmann mentionne que leurs roulements posent problème, et on entend un grand bruit de gémissement en arrière-plan. De toute évidence, de l'eau a pénétré dans le circuit d'huile du moteur et il n'y a qu'un litre de rechange à bord. Sans une charge suffisante de la batterie, un Open 60 ne peut pas naviguer. C'est pourquoi Boris mentionne en aparté que ce problème pourrait mettre fin à sa course.
Ce serait dommage, car si l'Allemand se situe actuellement dans la première moitié du classement, il est à portée de main des autres nouveaux bateaux comme le "Biotherm" de Paul Meilhat, le "Maître Coq" de Yannick Bestaven ou le "Initiatives Cœur" de Sam Davies.
Mais en tête, le favori Charly Dalin s'éloigne, seul mais apparemment inarrêtable. Il a déjà gagné près de 100 milles sur son poursuivant le plus acharné, le "Linked Out" de Thomas Ruyant. Il semble vraiment naviguer dans une autre ligue, il domine pratiquement toutes les courses cette année. Il est difficile de penser que l'année prochaine, il aura un nouveau bateau qui pourrait être encore plus rapide.
Après Ruyant, qui a également réussi à se détacher quelque peu, la course est en revanche très serrée et passionnante. Le tout nouveau "Charal" de Jérémy Beyou, équipé de rames X futuristes, est au coude à coude avec le nouveau "Holcim" de Kevin Escoffier et le "Bureau Vallée" de Louis Burton, que le troisième du Vendée Globe possède depuis 2021 et qui joue désormais aussi dans la ligue des foils - et de manière assez impressionnante. Il navigue sur l'ex-"L'Occitane" d'Armel Tripon, un design de Sam-Manuard.
La performance de trois femmes dans le peloton est jusqu'à présent assez forte : Isabelle Joschke est 12e avec son "MACSF", la Suissesse Justine Mettraux 15e avec "Teamworks" et Sam Davies 20e avec "Initatives Cœur". Mais ces classements ne reflètent qu'une partie de la vérité, car ils se basent sur la navigation en grand cercle, c'est-à-dire la route directe la plus courte, qui n'est pas forcément la meilleure en raison des conditions météo. Mais tous trois sont bien placés, Joschke au nord, Mettraux au centre, Davies plus au sud, pour éviter un peu la tempête qui s'annonce aujourd'hui avec un vent de plus de 40 nœuds. Les bateaux au nord ont déjà plus de vent et sont donc actuellement nettement plus rapides.
Il sera intéressant de voir qui passera le mieux à travers le front qui se dirige vers le champ. Demain, on verra si les bateaux plus au nord peuvent passer sans encombre et profiter du vent plus tôt de manière à en tirer avantage. L'un de ceux qui l'espèrent est Benjamin Dutreux, qui navigue avec "Guyot Environnement", le bateau avec lequel l'équipe OTG de Robert Stanjek prendra le départ de l'Ocean Race en janvier. Il est loin au nord et navigue actuellement près de quatre nœuds plus vite que les poursuivants de Charlie Dalin. Il sera intéressant de voir où il se retrouvera demain. En tout cas, cet homme de 32 ans est un dur à cuire et prend de gros risques.
En tête, la classe des Ultims, où l'actualité a été riche hier. Armel Le Cléac'h, qui a perdu sa dérive principale hier avec son Monster Tri "Banque Populaire", a raconté comment cela s'est passé. "J'ai entendu un grand bruit, puis j'ai vu des débris du sabre dériver à l'arrière du bateau dans l'eau de la poupe. Ils ont heurté la coque et l'ont endommagée à plusieurs endroits".
Mais le Breton a réussi à regagner dès hier la base de l'équipe à Lorient, où l'on travaille fébrilement sur le bateau : L'équipe a une dérive de rechange qui pourrait être utilisée si le puits de dérive n'est pas trop endommagé. "Nous aurions pu continuer sans dérive, si cela s'était produit après les Açores, nous l'aurions sérieusement envisagé", a raconté son team manager Ronan Lucas. La dérive est toutefois importante pour réguler l'horizontalité du bateau sur les foils, sans elle, les performances du bateau seraient déjà fortement compromises. La dérive serait également beaucoup plus importante sans le foil, surtout avec le cap au vent arrière que les bateaux suivent actuellement. Banque Populaire" peut reprendre la course jusqu'à samedi matin, après quoi la fenêtre de temps accordée par le règlement expirera.
En revanche, le leader Charles Caudrelier sur son "Edmond de Rothschild" a reçu des nouvelles rassurantes. Après lecture des données GPS du bateau et des bouées de départ équipées de trackers, le jury a constaté qu'il était à 50 mètres de la ligne de départ au moment du signal de départ. On ne peut pas faire mieux avec un tri de 30 mètres. La pénalité de quatre heures d'arrêt que le jury lui avait infligée hier a donc été annulée. Il devance actuellement de 28 milles le "SVR Lazartigue" de François Gabart, qui a pu gagner quelques milles pendant la nuit. A environ 20 milles derrière, on trouve "Sodebo Ultim" de Thomas Coville qui, après avoir été reconstruit sur des foils entièrement neufs et avec des coques latérales raccourcies de quatre mètres, semble avoir réussi à réduire considérablement le déficit avec le leader de la classe "Edmond de Rothschild".
La concurrence est incroyablement rude dans la plus grande classe de départ de la course, les Class 40, où douze bateaux sont séparés par dix milles, les trois premiers ne se séparant pas d'un mille, naviguant donc en vue tout au long de la course. Le "Polka Dot" d'Alex Mehran est en tête, suivi du "Queguiner Innoveo" de Corentin Douget. Mais le phénomène de la course est actuellement le favori Yoann Richomme. Après sa pénalité de quatre heures hier pour son départ anticipé, qui l'a relégué à la dernière place, il est déjà remonté à la 14e place, à seulement onze milles du leader. Il navigue donc véritablement le couteau entre les dents dans sa mission de défendre son titre de la dernière course.