Michael Good
· 20.02.2024
Certaines marques représentent plus que d'autres un créneau particulier, elles sont représentatives de toute une catégorie de bateaux. Par exemple, la marque : Hallberg-Rassy est incontestablement la référence en matière de navigation haut de gamme en eau bleue. De même, X-Yachts est exemplaire pour la croisière de performance et Brenta est presque devenu la marque emblématique du day-sailing moderne. Et les thèmes de la course au large et de la croisière rapide ont, pour leur part, une figure de proue très populaire avec la marque Pogo.
Le chantier naval breton Pogo Structures existe depuis 1987 sous la direction de son fondateur et propriétaire Christian Bouroullec. L'entreprise de Combrit, sur la côte ouest de la France, s'est fait connaître et a pris de l'importance notamment grâce à ses bateaux de la classe Mini 6.50, qui, sous la désignation Pogo 1, 2 et 3, fixent depuis des années les standards des nains rapides de haute mer, et ce déjà dans la troisième génération de modèles. Avec un nombre d'unités toujours considérable, les petits coureurs offshore couvrent pour l'essentiel le pain et le beurre pour les Français.
Parallèlement, Pogo s'est constitué au fil des ans une gamme notable de fast-cruisers, également appelés crossover, aptes à la croisière et à la navigation en haute mer. La ligne commence avec le Pogo 30 de neuf mètres de long (test dans YACHT 14/2013) et s'étend jusqu'au grand 50 avec une longueur de coque de plus de 15 mètres. Entre les deux, les Bretons ont continué à étoffer la gamme. En 2016, le Pogo 36 a été présenté (test dans YACHT 1/2017), ainsi que le Pogo 44, dont la conception est très proche de celle de sa petite sœur, mais qui est deux mètres plus long et 50 centimètres plus large. Il remplacera probablement à moyen terme le Pogo 12.50, qui est sur le marché depuis plus de dix ans.
Les pogos actuels de la série "Croisière", c'est-à-dire les types aptes à la navigation, sont tous issus du bureau d'études de Finot/Conq avec une signature largement homogène. En d'autres termes : des coques avec un bouchain prononcé et des poupes extrêmement larges, un double système de gouvernail avec deux barres dans le cockpit ainsi qu'un gréement performant et placé loin à l'arrière avec une surface de voile énorme. De plus, tous les pogos sont équipés d'une quille pivotante.
Pour le 44, le constructeur Pascal Conq a encore nettement durci les caractéristiques. En d'autres termes, les chinés prononcés sont encore plus inclinés à l'arrière, ce qui se traduit par une ligne de flottaison très rentrée et de longs porte-à-faux latéraux de la coque - mais uniquement en position de flottaison neutre. Même avec peu de gîte, la carène s'enfonce sous le vent sur toute la largeur jusqu'au bouchain, ce qui assure une grande portance ainsi qu'une stabilité de forme extrêmement élevée ; ainsi, une plus grande surface de voile peut rester plus longtemps en place. A cela s'ajoute la forte force de redressement générée par la quille pivotante avec son immense tirant d'eau de 3,10 mètres et un centre de gravité situé très bas.
Les carènes s'étendent jusqu'à l'avant, où elles se terminent par une partie avant très généreuse, une sorte de semi-scow-bug. Avec son nez large mais plat et son avant-pied très relevé, le Pogo est censé glisser sur les vagues plutôt que de les traverser. Le volume supplémentaire à l'avant aide en outre le bateau à moins s'enfoncer sur l'étrave en cas de forte pression et de gîte, ce qui lui permet de naviguer de manière plus équilibrée, plus rigide et donc, en fin de compte, plus rapide, surtout dans la houle.
Le langage des formes assez radical du Pogo 44 peut peut-être polariser, mais il correspond plus ou moins aux dernières découvertes en matière de design des coureurs de haute mer modernes. Les dernières constructions de la classe innovante Imoca-60, par exemple, avec leurs formes de coque optimisées pour les longs coups de godille, ont manifestement servi de modèle pour le développement du Pogo 44.
Dans le petit port de la petite ville pittoresque de Sainte-Marine en Bretagne, non loin du chantier naval, le Pogo 44 se distingue de la grande masse des petits bateaux plutôt discrets. Avec ses dimensions impressionnantes, surtout à l'arrière, cette imposante machine à voile semble plus grande qu'elle ne l'est en réalité. La partie arrière mesure tout de même 4,50 mètres de large, ce qui correspond à la plus grande portée de tous les bateaux. Pour les manœuvres dans le port et pour se garer dans le box, ce n'est pas forcément un avantage.
La maxime de Pogo est : réduction conséquente du poids. Toutes les pièces sont construites selon le procédé d'infusion sous vide.
En entrant dans le chantier naval de Pogo Structures, une chose saute aux yeux : L'odeur de polyester et de styrène n'est pas aussi forte que dans d'autres entreprises de ce type. Cela s'explique par le fait que Pogo fabrique toutes les pièces en PRV selon le procédé d'infusion sous vide, y compris la quille pivotante, non pas sous forme de sandwich mais de stratifié massif épais. Pogo garde le secret le mieux gardé sur les détails de ce procédé. La quille en fibre de verre, pourtant relativement légère, est insérée dans la partie inférieure d'un corps en plomb, la partie ballast proprement dite, et boulonnée à celle-ci. Ainsi, environ 1,95 tonne sur les 2,1 tonnes que pèse la quille (environ 92%) est installée à l'endroit le plus profond, c'est-à-dire entre 2,00 et 3,10 mètres de tirant d'eau.
Comme prévu, l'Atlantique offre des conditions parfaites pour le test de YACHT. Le vent de sud-ouest souffle entre 15 et 20 nœuds et pousse en plus une belle et longue houle devant lui. Sur un bateau comme le Pogo 44, on peut se réjouir des parcours rapides sous gennaker dans ces conditions. Mais avant d'en arriver là, il faut d'abord aller loin contre. 7,2 nœuds en moyenne sur la longue croix. Le bateau vire alors à plus de 90 degrés, ce qui est beaucoup pour un coureur axé sur la performance. De plus, la coque plate et l'avant plein martèlent parfois durement les vagues qui arrivent. Le croisement n'est pas vraiment la discipline de prédilection du Pogo 44 dans le vent et les vagues.
D'un autre côté, le bateau profite d'une grande stabilité de forme et d'un bon moment de redressement. Le Pogo navigue de manière remarquablement rigide et droite et supporte facilement les rafales sans qu'il soit nécessaire de régler constamment les voiles. Lors de longs voyages en mer, la grande stabilité sous voile est généralement un grand avantage, notamment pour le confort à bord.
Pour le retour, un gennaker de 165 mètres carrés est tiré dans le bas jusqu'au bout du mât. C'est alors qu'il faut agir : Accrochez-vous ! Le Pogo 44 accélère comme un petit dériveur, il fait feu comme s'il avait envie d'aller au port. Les valeurs à deux chiffres s'affichent rapidement sur le loch, et la proue bien remplie se lève déjà. Le bateau, qui mesure tout de même près de 13 mètres de long, se laisse facilement diriger à travers et au-dessus des vagues, il réagit immédiatement aux impulsions de direction données par la barre franche. La jauge enregistre 14,3 nœuds en pleine glisse comme record du jour lors du test YACHT, les gens de Pogo rapportent jusqu'à 18 nœuds de vitesse comme meilleure performance par vent encore plus fort. Ce sont des valeurs impressionnantes !
L'agencement du cockpit se caractérise par une division claire en deux parties. Toutes les drisses, écoutes et lignes de réglage sont commandées à l'avant, directement au niveau de la descente. Et elles sont nombreuses. Pour un total de 18 fonctions (y compris les écoutes de grand-voile et de voile d'avant), il y a quatre grands winchs à gauche et à droite de la descente, que l'équipage peut manœuvrer très efficacement debout et à bonne hauteur. Sur demande, deux d'entre eux sont également disponibles avec des commandes électriques. La distance entre les tambours et les taquets est en outre suffisamment grande pour que toutes les lignes puissent passer au choix par l'un ou l'autre des winchs. De cette manière, les fonctions ne se bloquent pas pendant les manœuvres. Dans l'ensemble, l'agencement du cockpit avant est plutôt inhabituel, mais il s'avère très fonctionnel et pratique - une bonne solution.
Tout à l'arrière, le barreur est assis latéralement sur le pont de roulement ou, plus à l'avant, il est plus à l'aise et protégé sur le pont du cockpit. De ces deux positions, il a une bonne maîtrise de la barre franche proche, avec ou sans potence. Mais à part barrer, il n'a pas grand-chose à faire à cet endroit. Seule la corde de réglage du chariot - particulièrement importante dans ce concept de gréement - est à portée de main. Le barreur n'a pas accès à toutes les autres fonctions de la descente depuis sa position.
Celui qui veut naviguer sur le Pogo 44 avec un équipage réduit, en deux ou en solitaire, doit obligatoirement se faire installer un bon pilote automatique fiable. Celui-ci fait sans aucun doute partie du concept et devrait déjà faire partie de la livraison standard. Au lieu de deux barres, Pogo Structures pourrait aussi construire le nouveau 44 avec deux volants.
Le gréement est placé inhabituellement loin à l'arrière, assez exactement au milieu de la longueur de la coque. Le génois (appelé solent par les Français), qui ne se chevauche que brièvement, est donc proportionnellement plus grand que dans les concepts de gréement traditionnels. A cela s'ajoute une grand-voile lattée avec une tête de mât très évasée (square ou fathead). Comme le mât, avec ses barres de flèche très longues et fortement inclinées, n'a pas besoin de barres de flèche et de chute, le voilier a plus de liberté pour la grand-voile en ce qui concerne l'arrondi et l'exposition dans la chute.
En standard, le Pogo 44 est livré avec un mât et une bôme en aluminium. Un gréement en fibre de carbone est disponible moyennant un supplément. Pour un bateau aussi performant que le Pogo 44, cet investissement supplémentaire en vaut vraiment la peine, non seulement parce que le mât en carbone avec haubans est plus léger, mais aussi parce qu'il est nettement plus rigide que le profilé en aluminium. Pour ce plan de gréement spécial sans pataras, c'est essentiel car la tension sur les haubans doit être extrêmement élevée et les charges sont donc considérables.
Même pour un simple jeu de voiles avec grand-voile et solent, l'acheteur doit prévoir un surcoût non négligeable en plus du prix de base, selon la qualité et le modèle. De toute façon, le concept Pogo n'a guère de sens sans gennaker et (ou) code zéro. Et ces voiles ne sont malheureusement pas non plus gratuites. De plus, pour les longs bords, il est indispensable d'avoir une voile de trinquette plus petite que le foc, ce qu'on appelle une trinquette.
Au moins une voile supplémentaire, par exemple le gennaker dans le tube de récupération, peut être stockée à l'avant dans le coqueron avant, où la chaîne de l'ancre se trouve également dans une zone isolée. Toutefois, l'espace de rangement est vite épuisé et l'écoutille est de toute façon trop petite pour les grands sacs à voile. Il y a un peu plus de place à l'arrière dans le cockpit arrière, mais il faut faire attention à ce que les objets à ranger comme les voiles, les défenses ou les amarres ne s'emmêlent pas avec le mécanisme de commande qui passe sous le pont sans aucune protection avec des barres de poussée. Il n'y a malheureusement pas d'espaces de rangement supplémentaires prévus, comme par exemple des coffres de rangement sous les coins du cockpit.
Un compartiment de rangement séparé est intégré à l'arrière pour le radeau de sauvetage. En cas de besoin, la boîte de sauvetage serait toutefois difficilement accessible, car la trappe s'ouvre vers le haut et bloque l'accès. Il serait préférable d'avoir une trappe montée sans charnières, qui pourrait être retirée rapidement et complètement en cas d'urgence.
Pour l'aménagement sous le pont, le Pogo 44 profite également de sa coque exceptionnellement volumineuse. En raison de la grande largeur à l'arrière, les couchettes peuvent être rectangulaires, ce qui est agréable pour dormir à deux. L'espace à l'avant est également supérieur à la moyenne et les dimensions du lit double des propriétaires sont bien supérieures aux dimensions standard pour cette taille de bateau. De plus, la couchette du canapé dans le salon peut être transformée en lit double supplémentaire grâce à une table abaissable. Huit personnes peuvent donc passer la nuit sans problème sur le Pogo 44. Deux salles d'eau sont prévues à cet effet.
Pogo propose des alternatives d'aménagement pour la partie avant du bateau, où deux cabines peuvent également être installées. D'après les plans, les couchettes sont cependant assez étroites et ne peuvent être utilisées que par une seule personne. Il y a aussi un peu de variation pour les toilettes à l'avant. Au lieu du compartiment douche séparé, on pourrait y installer une armoire pour les cirés mouillés.
L'aménagement intérieur est simple et sans fioritures, mais il convainc par sa grande fonctionnalité et son confort surprenant. La cuisine, intégrée dans le salon à tribord sous la forme d'une longue ligne, offre de grandes surfaces de travail et de nombreux espaces de rangement facilement utilisables. Les grandes fenêtres de la superstructure et de la coque, qui offrent une vue aussi bien debout qu'assis, donnent l'impression d'une ambiance ouverte et lumineuse. Actuellement très à la mode sur les bateaux français, les fenêtres de la superstructure de la cabine, qui se rétrécit fortement vers l'avant, permettent en outre de voir de l'intérieur dans le sens de la marche et même un peu dans les voiles.
Conformément à la philosophie du concept Pogo, le chantier naval a également accordé une grande importance à la réduction maximale du poids pour l'aménagement intérieur. Dans la mesure du possible, les Français ont utilisé des pièces en composite, légères comme une plume mais néanmoins robustes, plutôt que des composants plus lourds en contreplaqué. Les cabines sont séparées uniquement par des rideaux plutôt que par des portes, qui sont toutefois disponibles en option. Et le chantier naval n'utilise pas de lourdes coques intérieures, ni dans le salon ni dans les cabines. Au contraire, le dessous du pont Infusion, à l'origine assez rugueux, est poncé et mastiqué jusqu'à ce que les surfaces soient absolument parfaites.
Le concept du Pogo 44 est capable de fournir de bons compromis et de jeter des ponts entre de nombreuses exigences. Naviguer rapidement et avec succès en régate ou naviguer sportivement en famille - les deux sont possibles. En même temps, c'est un bateau exigeant et assez compliqué à naviguer. Il est indispensable d'avoir des connaissances de base en voile. Ce n'est donc pas un bateau pour les débutants, mais plutôt pour les personnes actives et ambitieuses. S'ennuyer sur les longues traversées ? Certainement pas avec ce bateau !
Sandwich en PRV avec noyau en mousse, construit par infusion sous vide. Résine vinylester à l'extérieur, polyester à l'intérieur
Un fast-cruiser ultime et exigeant pour les passages rapides et les navigations sportives. La construction va loin dans les extrêmes, ce qui polarise visuellement, mais devrait convenir à une certaine clientèle. Intérieur confortable
L'article est paru pour la première fois dans YACHT 17/2021 et a été mis à jour pour cette version en ligne.