La coproduction franco-slovène First 36 a eu un impact immédiat sur le marché. L'intérêt des acheteurs est si grand que la production a été augmentée à trois yachts par mois. Il semble que ce soit l'orientation particulière du First 36 qui ait touché une corde sensible chez le client.
Le First 36 a beaucoup à offrir des deux sphères du segment des cruisers de performance : Plaisir et vitesse d'une part, volume et confort d'autre part. Et cela sans grand compromis. Il semble d'emblée cohérent et, pour un premier modèle, étonnamment bien construit. On en oublierait presque qu'il représente pour Seascape un véritable bond en avant dans sa gamme de modèles : plus de systèmes, un plan de laminage plus élaboré, une structure nettement plus compliquée, des charges plus élevées.
Les ingénieux Slovènes ne se sont pas laissés décourager par le fait qu'ils s'aventurent en terre inconnue avec le First 36. Depuis l'arrivée de Beneteau, ils ont transféré et modernisé toute leur production. Même l'administration, longtemps installée sur un autre site, est désormais totalement intégrée. Là où se trouvait autrefois la plus grande usine de fabrication de cintres en bois d'Europe, sur un site au charme industriel rustique, l'équipe du cofondateur Kristian Hajnsek construit désormais des bateaux de plaisance maintes fois primés pour le plus grand groupe de chantiers navals du monde.
La répartition des tâches fonctionne ainsi : Beneteau développe et produit lui-même les grands modèles First, plus luxueux, à partir de 44 pieds. Le programme jusqu'à 40 pieds est quant à lui entièrement réalisé par Seascape à Preserje, dans la banlieue de Ljubljana.
La liste des ingénieurs impliqués dans le First 36 se lit comme un who's who du monde du yachting. La construction est l'œuvre du designer attitré de Seascape, Sam Manuard, qui s'est fait un nom sur les Mini 6.50, puis sur la Class 40, et qui contribue désormais à façonner la classe Imoca. Giovanni Belgrano a contribué aux calculs de structure ; son équipe de Pure-Design travaille sur les derniers America's Cupers ainsi que pour X-Yachts et de nombreux autres chantiers navals renommés. L'architecte vedette Lorenzo Argento est responsable du style et GigoDesign de la fonctionnalité. Et puis, il y a aussi le savoir-faire concentré des équipes de Beneteau et de Seascape. Tout cela fait du First 36 le bateau de série le plus sophistiqué du moment.
Ce qui est peut-être le plus surprenant, c'est la discrétion de ce nouveau modèle. Il ne porte pas de dodger au-dessus de la descente, comme tous les Class 40, Imoca 60 ou Bente 39 actuels, et sa cabine, contrairement aux derniers modèles de Pogo et JPK, a l'air tout à fait classique avec ses vitres latérales à angles multiples. Même le cockpit semble conventionnel : à la place de la barre franche qui caractérisait jusqu'ici Seascape, on trouve les deux postes de pilotage habituels aujourd'hui.
Où sont donc les innovations ? Qu'est-ce qui distingue le First du reste du marché ? Pour le comprendre, il est recommandé de visiter le chantier naval. C'est là que l'on peut le mieux saisir les particularités de la construction : Le puzzle XXL de noyaux en mousse Corecell découpés au millimètre près, qui confère au stratifié sandwich autant de légèreté que de solidité, est à la fois sophistiqué et très complexe. L'extrême finesse des bords de fuite des safrans fabriqués en interne. Comme la plate-forme de bain avec noyau en nid d'abeille pèse peu (8 kg seulement !). Et à quel point chaque module de meuble sert aussi à raidir la coque.
Le résultat final est un déplacement de seulement 4,8 tonnes, soit un quart de plus que le Pogo 36 de conception encore plus extrême, mais plus d'un tiers de moins que le Dehler 38 de taille comparable. C'est la base des performances du bateau : moins de poids, plus de milles.
La capacité de charge de 5,1 voiles place le First 36 au-dessus des Dehler 38, Elan E4 ou J/112 E. Le chef de Seascape, Andraz Mihelin, a donc créé une nouvelle catégorie pour ce voilier et l'a justifiée par des paramètres de performance : "Nous nous situons entre le Racer/Cruiser et le Performance-Cruiser", dit-il. Il considère donc le First 36, avec le JPK 39 et le Pogo 36, comme faisant partie du segment des "High-Performance-Cruiser".
Reste à savoir si le terme s'établira. Dans les faits, l'exigence de la classe spéciale est tout à fait compréhensible si l'on prend la glisse comme critère. Le First 36 a besoin d'à peine 12 nœuds de vent pour laisser échapper le mode de déplacement par l'arrière, sous gennaker, tout comme son propre système d'arbre. Il dépasse alors la vitesse de sa coque, l'eau se déchire à l'arrière entre 8,5 et 9 nœuds de vitesse. Un état qui, sur des yachts plus conventionnels de cette classe, nécessite plus de vent, plus de vagues et généralement aussi beaucoup plus de courage.
Le First 36 fait de la glisse un état normal, il navigue d'une part en gardant le cap, et se laisse en même temps diriger rapidement et avec une précision chirurgicale vers le bas des vagues grâce aux doubles rames.
Lors du test le long de la côte slovène, l'impression de calme plat était encore plus saisissante. Lorsque l'anémomètre détecte 4 à 5 nœuds de mouvement d'air à l'arrêt du mât, la surface de l'eau reste immobile comme un miroir. Juste un courant d'altitude donc. Et pourtant, il suffit à propulser le bateau avec Code Zero sur une demi-vitesse pointue à peu près à la vitesse du vent.
Cela ne parle pas seulement en faveur de la construction légère, mais tout autant en faveur des lignes de coque efficaces. Le First 36 bénéficie ici de l'immense expérience de Sam Manuard. Il s'agit d'un Class 40 légèrement rétréci, converti en bateau de croisière - modérément par rapport à un racer de haute mer, mais avec le même ADN.
YACHT a ensuite eu l'occasion de faire naviguer une nouvelle fois le First 36 dans des conditions plus ventées, dans le cadre d'un test comparatif de six cruisers de performance.
Les conditions étaient optimales sur le fjord de Flensburg, avec un vent de 10 à 15 nœuds, parfois plus avec des rafales de 20 nœuds. Après plusieurs navigations comparatives, une image assez claire s'est dégagée. Au portant, le First 36 moderne s'est distingué par ses performances exceptionnelles. La Française était visiblement plus rapide que ses concurrentes, glissait avec son énorme gennaker dès 4 à 5 Beaufort et affichait parfois 15 nœuds de vitesse sur le loch dans les rafales. C'était une véritable explosion de plaisir, surtout pour le barreur. Avec ses deux safrans, le First 36 se laissait diriger vers l'avant avec une grande réactivité, afin de parer sans problème les rafales venimeuses et les nombreux virements de bord sur le ford de Flensburg. En barrant activement, on peut faire la plupart du travail du régleur de gennaker sur le parcours au portant. C'est non seulement très amusant, mais c'est aussi un argument de poids, surtout pour une utilisation avec un équipage réduit.
En comparaison directe, le First 36 s'est comporté de manière beaucoup plus nerveuse face au vent. L'installation de gouvernail avec des safrans doubles, mais plus petits, est réglée de manière très neutre, il n'y a pratiquement pas de pression sur le gouvernail, ce qui est habituel pour des bateaux de ce type et de cette orientation. Mais cela rendait plus difficile la conduite optimale du bateau au vent et exigeait une attention sans faille du barreur pour le bateau. Il fallait travailler davantage à la roue et corriger le cap qu'avec les bateaux concurrents.
Le First 36 offre également beaucoup de plaisir. Le cockpit est l'un des meilleurs de la classe. Le barreur et l'équipage ont une grande liberté de mouvement et tout est à portée de main. Le mât en aluminium peut être réglé proprement à l'aide de l'étai arrière, tout comme le génois grâce aux points d'amures 3D.
Même sous le pont, le First 36 est remarquablement beau et confortable, malgré sa construction légère. Bien sûr, il faut faire de petites concessions : Il y a un manque d'espace de rangement dans le salon, mais seulement là. Le cabinet de toilette est un peu juste. Le diesel Yanmar, tout comme la pompe à eau sous pression du bateau de test, fonctionnait de manière assez bruyante. Pour un bateau de ce rapport qualité-prix, c'est un petit prix qui est compensé par les excellentes propriétés de navigation.
Supplément pour l'équipement de confort
Le First 36 navigue de manière fantastique, sans être extrême nulle part. Et il est bien plus confortable sous le pont que ses petites sœurs. L'un dans l'autre, cela donne un cruiser de performance plutôt bon. Quand on en a un.