Le fait qu'Yvan Bourgnon ait réussi à traverser le passage du Nord-Ouest en catamaran de sport en 2017 est toujours considéré comme un événement majeur. sur le site de son principal sponsor a été retenu comme record : "travelling solo from Alaska to Greenland, via the Northwest Passage, in a sport catamaran, without a cabin or any assistance". Cependant, en ce qui concerne la dernière partie de la phrase "sans assistance", les premiers doutes sont rapidement apparus.
Selon des articles de presse concordants du "Figaro" et du "Spiegel", le Suisse de 51 ans comparaît pour cela à partir d'aujourd'hui devant le tribunal. Le réalisateur Pierre Guyot, qui voulait faire un film sur la croisière, accuse le navigateur d'escroquerie. Il a été déçu par les images filmées par les caméras qu'il avait installées sur le catamaran, et le tracking présentait également des lacunes. Mais selon Bourgnon, cela était dû uniquement à des raisons techniques.
Bourgnon doit maintenant répondre devant la justice de "mensonge par omission", mais il nie lui-même cette accusation. Selon lui, Guyot veut le faire passer pour un escroc : "Le tribunal se prononcera sur des questions de droits d'auteur et d'exploitation d'images prises lors du défi des Passages du Nord-Ouest, que j'ai moi-même filmées. Le procès ne porte donc en aucun cas sur les conditions de cette traversée".
Pas d'ours polaires dangereux, Bourgnon à l'hôtel à la place
La date du jugement n'est pas encore connue. La question centrale de la procédure est de savoir si Yvan Bourgnon a parcouru le trajet par ses propres moyens ou non. Il lui est reproché d'avoir été traîné et aidé d'une autre manière en cours de route.
Des doutes subsistent également quant aux récits rocambolesques du navigateur. Bourgnon a entre-temps reconnu lui-même les faits qui lui sont reprochés, du moins en partie. Ainsi, il a probablement fait des pauses pendant les 70 jours de sa traversée. Il a déclaré à ce sujet : "J'ai passé des nuits à l'hôtel, et alors ? Est-ce que je devrais abandonner pour autant ?" La rencontre spectaculaire avec un ours polaire qu'il a décrite serait en outre un mensonge.
La lauréate du prix Trans-Ocean Susanne Huber-Curphey, qui a traversé le passage du Nord-Ouest à la même époque, a formulé pour la première fois de graves accusations contre Bourgnon peu après son aventure. Elle a ainsi rapporté que l'aventurier avait accepté à plusieurs reprises l'aide de tiers, y compris la sienne. De plus, il aurait été remorqué sur environ 90 miles par un navigateur néerlandais sur le bateau duquel il aurait passé six jours. Bourgnon aurait demandé à ce dernier et à la jeune femme de garder le secret sur leur aide. Lui-même s'en est longtemps tenu à la version selon laquelle il avait effectué la traversée complète sans assistance sur le catamaran de sport ouvert. C'est ce qu'il a souligné lors d'un entretien avec YACHT en 2018, suite à une demande explicite.
Du héros célébré à l'escroc
Lorsqu'en 2015, Yvan Bourgnon a réussi un tour du monde à la voile avec un catamaran de sport ouvert, il a stupéfié le monde de la voile. "Un Suisse réussit l'impossible", titrait alors le magazine YACHT. Deux ans plus tard, il s'est lancé dans sa prochaine aventure, la traversée du passage du Nord-Ouest. Après 70 jours en mer, le 22 septembre 2017, il a atteint son objectif et a été salué pour son exploit.
Mais après avoir douté de ses performances, il a depuis été retiré de la liste officielle des transits par le passage du Nord-Ouest, tenue par le Scott Polar Research Institute de la prestigieuse université de Cambridge. La raison en est le soutien apporté à Bourgnon par d'autres navires. Pour la même raison, le nom de Clark Stede ne figure pas non plus dans la liste. En 1990, cet homme originaire d'Augsbourg n'avait réussi à franchir le passage que grâce à l'aide d'un brise-glace.
