Kristina Müller
· 24.08.2022
Un participant a fait les gros titres avant même le départ. L'Indien Abhilash Tomy a eu une collision avec un cargo sur son Rustler 36 lors de la course d'ouverture entre Gijon et Les Sables. L'avant de son bateau a été endommagé. Lors de la Golden Globe Race 2018/19, Tomy avait déjà connu une terrible avarie dans l'océan Indien avec son précédent bateau et avait dû être secouru, grièvement blessé. Les équipes et les chantiers navals présents sur place aux Sables ont toutefois promis leur aide, de sorte que le bateau devrait être remis en état pour le départ.
Cette édition de la Golden Globe Race est la troisième, ou plus exactement la deuxième de l'ère moderne. En 1968/69 a eu lieu la toute première course autour du monde en solitaire et sans escale, la "Sunday Times Golden Globe Race". Pour le jubilé, 50 ans plus tard, une nouvelle course autour du monde en solitaire et sans escale devait avoir lieu comme à l'époque - c'est du moins ce que Don McIntyre s'était mis en tête. Son slogan : "The Race returns - sailing like it's 1968". Lorsque le navigateur australien, initiateur d'événements de voile aventureux, a annoncé son idée, celle-ci a rencontré un grand succès. Des skippers du monde entier se sont inscrits au Golden Globe Revival il y a quatre ans. 17 ont finalement franchi la ligne de départ devant la ville portuaire des Sables-d'Olonne. Les obstacles à la qualification étaient déjà élevés à l'époque.
Seuls cinq bateaux ont réussi à franchir la ligne d'arrivée. Le taux d'abandon était donc bien plus important que lors du Vendée Globe. De nombreux navigateurs ont abandonné en raison de la solitude ou de problèmes techniques, certains se sont cassés le mât ou ont même subi de graves avaries, comme l'Indien Abhilash Tomy ou la Britannique Susie Goodall.
C'est alors qu'un mardi matin gris, une pointe de mât solitaire se dessine à l'horizon, au large de la côte atlantique française. Il était là, le vainqueur ! Ce 29 janvier 2019, Jean-Luc Van Den Heede ( Interview à la fin de l'article ) est revenu de son tour du monde à la voile sans escale et a remporté la Golden Globe Race, qui avait débuté presque sept mois plus tôt aux Sables-d'Olonne. Malgré toutes les critiques qui lui ont été adressées, la réédition de cet événement historique de la voile a été un succès et en est à sa deuxième édition.
La liste d'attente pour les places de départ de cette nouvelle édition s'est rapidement remplie. Contrairement à la Vendée, le Golden Globe attire surtout tous ceux qui, malgré un budget serré, veulent participer une fois dans leur vie à une régate autour du monde. Un bon tiers des participants naviguent toutefois avec des ambitions sportives et veulent gagner. Le groupe des navigateurs de la Golden Globe Race, qui viennent du monde entier, est donc très hétérogène. Certains ont déjà fait le tour du monde à la voile, d'autres n'ont qu'une expérience limitée de la haute mer. Le plus jeune, l'Américain Elliott Smith, a 27 ans, le plus âgé, le Canadien Edward Walentynowicz, 68 ans.
Certains tentent leur chance pour la deuxième fois. Abhilash Tomy, le Britannique Ertan Beskardes, l'Australien Mark Sinclair et le Finlandais Tapio Lehtinen étaient déjà présents en 2018. D'autres n'avaient alors pas terminé leurs bateaux et avaient reporté leur participation de quatre ans. Ils s'apprêtent donc à prendre le départ avec un temps de préparation plus long. L'Autrichien Michael Guggenberger en fait partie.
De nombreux bateaux qui ont navigué en 2018 ont rapidement trouvé un nouveau propriétaire et sont à nouveau de la partie, en partie modifiés et équipés. Les yachts sur lesquels on navigue font de toute façon le charme de la Golden Globe Race : Seuls les yachts de croisière de série à quille longue, construits avant 1988 et mesurant entre 32 et 36 pieds, sont autorisés.
Après le succès de Jean-Luc Van Den Heede, son type de bateau, le Rustler 36, a connu une véritable ruée. Quatre des 16 navigateurs qualifiés au moment de la clôture de la rédaction prendront le départ avec ce type de bateau. Parmi eux, le co-favori Damien Guillou, ex-préparateur du skipper vendéen Kevin Escoffier.
L'organisateur veut également tenir compte de l'esprit du temps de l'ancienne Golden Globe Race en ce qui concerne les bateaux. L'équipement autorisé à bord et les règles doivent rappeler 1968 et manifester le caractère d'une régate rétro.
Ainsi, aucun moyen électronique ne peut être utilisé pour la navigation. La navigation se fait comme à l'époque, avec une carte maritime en papier et un sextant, avec un log de remorquage et un compas. La communication est également rudimentaire par rapport aux régates offshore actuelles : elle se fait uniquement par radio. Les RLS et le téléphone satellite ne sont embarqués qu'en cas d'urgence et pour les échanges avec l'organisateur.
La commercialisation de la course a également influencé le choix de l'itinéraire. Ainsi, le long des 30 000 milles marins autour du globe, il y a quatre "Film Drops". Les skippers doivent faire escale à Lanzarote, au Cap, à Hobart et à Punta del Este. Ils doivent y livrer du matériel photo et vidéo et donner une interview. Ensuite, ils continuent à naviguer.
En 2018/19, il n'y avait que deux arrêts de ce type. Le passage à quatre "enlève aussi des options tactiques aux skippers", reconnaît Lutz Kohne. Cet Allemand de 27 ans travaille comme directeur de course adjoint pour l'organisateur et suit la course 24 heures sur 24. "En 2018, les skippers de Hobart à la France ont eu une quantité folle d'options", explique Kohne, qui est lui-même un navigateur ambitieux en solitaire et qui vise une participation en 2026. "Cela sera désormais fortement limité par l'arrêt à Punta del Este en Uruguay".
D'autres changements importants dans les règles de course concernent surtout la communication à bord, qui avait provoqué des problèmes il y a quatre ans. On soupçonnait certains skippers de se faire transmettre des informations météorologiques par radio amateur, que leurs amis ou leur famille à la maison pouvaient consulter et interpréter via des outils météo - ce qui s'apparentait à du routage météo et était interdit par le règlement.
Afin d'éviter ce genre de soutien extérieur, les radios amateurs HAM ne sont plus autorisées à bord. En revanche, l'utilisation de télécopieurs météorologiques est désormais autorisée, ce qui permet aux solistes d'imprimer des cartes météorologiques à bord pour leur propre interprétation.
En outre, une autre course en solitaire a été ajoutée aux conditions de qualification : elle doit être longue d'au moins 2 000 milles, se faire uniquement au sextant et se dérouler sur le bateau avec lequel le Golden Globe est couru. C'est là que l'on voit l'éventail des navigateurs : si certains ont déjà pu parcourir sur leur bateau presque la distance d'un demi-tour du monde en préparation, d'autres ont eu du mal à se rendre sur la ligne de départ - ou ont dû retirer leur inscription quelques semaines avant le départ.
Le changement le plus important devrait concerner le timing. La date de départ a été repoussée de deux mois par an, de début juillet à début septembre. "Cela devrait permettre d'atteindre les latitudes sud plus tard et de réduire le risque d'être pris dans des tempêtes", explique le vice-directeur de la course Kohne.
Le fait que les vieux yachts de croisière soient fondamentalement inadaptés aux conditions des rudes latitudes sud est une critique qui avait déjà été formulée à maintes reprises lors du premier Golden Globe Revival. Mais le vainqueur Jean-Luc Van Den Heede voit les choses autrement. "Les bateaux peuvent le faire. Je le referais avec".
Le vétéran de la course au large sera tout de même présent le dimanche 4 septembre sur l'eau, dans un bateau d'accompagnement, lorsque le départ sera donné - lorsque les yachts disparaîtront à l'horizon, là où il est réapparu ce mardi matin de janvier.
Monsieur Van Den Heede, de nombreux participants au Golden Globe vous demandent conseil. Que vous demande-t-on le plus souvent ?
Beaucoup de choses ! Il s'agit de la météo, des voiles et de tout le reste. On vient de me demander comment j'ai fait pour mettre mon vin en bouteille. (rires)
Alors, comment avez-vous ?
J'avais des bidons de trois litres, c'est le plus pratique.
Quel autre message donnez-vous ?
Qu'il faut de la force mentale pour y arriver et une très bonne préparation. J'ai pu gagner parce que j'étais bien préparé. J'ai eu trois ans pour le faire et j'ai navigué à plein temps. C'était la clé du succès.
Qu'est-ce qui sera différent cette fois-ci ?
Ce qui est plus difficile à mon avis, c'est qu'il y a quatre arrêts obligatoires au lieu de deux. On est là, dans son propre monde. Le contact soudain nous arrache à notre propre rythme. Quand on rencontre soudain des gens, c'est étrange et pas facile.
Pensez-vous que la course soit devenue plus professionnelle entre-temps ?
Les skippers le font toujours parce qu'ils veulent faire le tour du monde à la voile et arriver à bon port. Seuls 30 % environ le font pour des raisons sportives. Le défi est d'arriver ! Mais la grande différence avec 2018, c'est que l'on peut désormais compter sur l'expérience de ceux qui ont tenté l'expérience il y a quatre ans.
Vous vivez aux Sables, vous suivez directement les préparatifs. Cela ne vous tente-t-il pas d'y participer à nouveau ?
Tout à fait. Mais je suis trop vieux pour ça maintenant, je n'ai plus 35 ans.
Qui croisez-vous particulièrement les doigts, avez-vous un favori ?
Oui, bien sûr, plusieurs. Mais dans cette course, tout peut arriver. Tout peut se casser ! Pour gagner cette course, il faut d'abord arriver.