Longue Route 2024Cinq navigateurs à nouveau sur les traces de Moitessier

Fabian Boerger

 · 21.12.2024

Lors du départ de la deuxième Longue Route, le "Joshua", le bateau de Bernard Moitessier, était également de la partie à Lorient.
Photo : LONGUE ROUTE/ Bruno Tréca
C'est la mi-temps de la Longue Route 2024 : depuis août, six solitaires font le tour du monde sans escale. Ils font ensemble le tour du monde en solitaire - pour la deuxième fois, dans l'esprit de la légende de la voile Bernard Moitessier. Mais qui sont les navigateurs qui se sont lancés dans l'aventure ? Un aperçu.

Nous sommes le 18 mars 1969. A l'ombre de la Montagne de la Table, à quelques miles nautiques au sud du Cap, un pétrolier est en rade. Le soleil brille, l'eau est calme. Un ketch en acier de douze mètres de long, à la coque rouge et portant le nom de "Joshua" sur le pont blanc, s'approche du navire. Clac ! Avec une fronde, l'homme sur le voilier envoie quelque chose vers le pont. Il s'agit d'un message qui s'envole par là et qui contient l'invitation à le transmettre au journal britannique "Sunday Times" :

Cher Robert, nous avons arrondi la corne le 5 février. Nous sommes aujourd'hui le 18 mars. Je poursuis ma route vers les îles du Pacifique sans escale, parce que je suis heureux en mer et peut-être aussi pour sauver mon âme".

L'expéditeur du message et l'homme sur le deux-mâts rouge est le Français Bernard Moitessier. À ce moment-là, il a déjà fait une fois le tour du monde à la voile. En tant que participant à la Sunday Times Golden Globe Race, la première course autour du monde en solitaire et sans escale, il avait croisé sa route quelques jours auparavant. Mais au lieu de retourner à Plymouth, en Angleterre, et de gagner ainsi la course, il a poursuivi son voyage vers la Polynésie, renonçant à une victoire certaine - et est entré dans l'histoire de la voile.

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La victoire manquée de Moitessier : un classique de la littérature de voile

Moitessier, qui préférait la liberté en mer à la victoire et à la "pression de la civilisation" sur terre, deviendra une source d'inspiration pour beaucoup au cours des décennies suivantes. Son livre sur le voyage, publié plus tard, est devenu un classique de la littérature de voile et sa "victoire offerte" reste aujourd'hui encore le symbole d'une liberté qui s'oriente au rythme de la mer et de sa propre intuition.

Pour faire revivre cet esprit de liberté et célébrer le 50e anniversaire du voyage, le Franco-Américain Guy Bernardin a créé la Longue Route. Il ne s'agit pas d'une régate au sens classique du terme, mais plutôt d'une aventure entre personnes partageant les mêmes idées. Sans assistance ni escale, les participants naviguent sur les traces de Moitessier autour des trois caps du monde. Il n'y a pas de chronométrage, pas de prix et peu de règles. Il s'agit plutôt de réaliser son rêve de liberté en mer.

Lancement de la deuxième Longue Route en août 2024

Et ce pour la deuxième fois déjà : après la première édition en 2018, six navigateurs se sont à nouveau lancés dans un tour du monde à la mi-août 2024. Au départ de Lorient, le "Joshua", le légendaire voilier de Moitessier, était également de la partie. Parmi les participants figure la navigatrice allemande d'exception Susanne Huber-Curphey. Elle a pris le départ aux Açores en juillet avec son "Nehaj" et est en tête du peloton.


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Bruno Tréca, co-organisateur de la Longue Route, est régulièrement en contact avec les navigateurs. Tous les jours à midi, ils envoient leur position et parfois un message via une balise Iridium. "Ils ont l'air de se sentir à l'aise. Ce sont tous des passionnés de voile. Bien sûr, il y a aussi des conditions difficiles - surtout après le Cap de Bonne Espérance", dit Tréca.

Premières arrivées attendues en avril 2025

Un participant, Alfonso Pascual, a déjà dû s'arrêter deux fois, selon Tréca : une fois à cause d'un watermaker défectueux et une fois parce qu'une vague a détruit sa girouette et son panneau solaire. Un autre navigateur, Eric Beauvilain, a abandonné au Brésil parce qu'il avait des doutes sur la stabilité de son bateau. A part cela, les cinq participants restants sont en bonne forme et heureux d'être en mer, affirme Tréca, qui prévoit les premières arrivées en mars ou avril 2025 à Lorient, en France - l'année même où Bernard Moitessier aurait eu cent ans.

Dans le sens des aiguilles d'une montre, on fait le tour du globe dans la mer du Sud. Le site web des organisateurs permet de suivre la position des participants. De gauche à droite : Huber-Curphey (bleu), Maiffrédy (rouge), Pascual (orange), Switala (rouge). Huglo n'est pas visible sur la carte. Il est en train de passer de la droite à la gauche de la carte. Le symbole blanc correspond à l'emplacement d'Eric Beauvilain. Il s'est retiré prématurément.Source : LONGUE ROUTE/ Screenshot (Stand: 10.12.2024)Dans le sens des aiguilles d'une montre, on fait le tour du globe dans la mer du Sud. Le site web des organisateurs permet de suivre la position des participants. De gauche à droite : Huber-Curphey (bleu), Maiffrédy (rouge), Pascual (orange), Switala (rouge). Huglo n'est pas visible sur la carte. Il est en train de passer de la droite à la gauche de la carte. Le symbole blanc correspond à l'emplacement d'Eric Beauvilain. Il s'est retiré prématurément.

Les navigateurs de Longue Route en un coup d'œil

Au total, cinq navigateurs et navigatrices sont encore en lice pour la Longue Route 2024. Vous trouverez leurs positions actuelles ainsi que des petites mises à jour du bord sur longue-route-2024. fr. Les participants ont des motivations différentes pour participer à la Longue Route. Nous les présentons ci-dessous :

Une navigatrice d'exception originaire d'Allemagne

Susanne Huber-Curphey a consacré sa vie à la navigation au long cours. Entre 2007 et 2011, elle a fait le tour du monde en solitaire, parallèlement à son mari Tony Curphey. En 2017, elle est devenue la première femme à réussir la traversée du passage du Nord-Ouest en solitaire. En 2018, elle a participé pour la première fois à la Longue Route et est devenue la deuxième femme allemande à faire le tour du monde sans escale. Au lieu de terminer, elle a ensuite poursuivi sa route vers l'est - dans l'esprit de Moitessier (le YACHT a rapporté). En 2019, elle s'est malencontreusement échouée au large de La Réunion. Aujourd'hui, elle est de nouveau de la partie.

Sur d'un site Internet propre Huber-Curphey rédige un journal de bord numérique. On peut également y consulter sa position actuelle.

Susanne Huber-Curphey sur son "NehajPhoto : LONGUE ROUTE/ Bruno TrécaSusanne Huber-Curphey sur son "Nehaj

Deuxième tentative avec le même navire

Pierre-André Huglo, 64 ans, et son classique GfK "Fresh Herring" forment une équipe bien rodée. Ils ont déjà participé à la Longue Route en 2018. C'est surtout la navigation en solitaire qui fascine ce Français du Nord. Il a déjà parcouru plus de 100 000 miles nautiques en solitaire. À l'âge de 14 ans, il a navigué seul pendant des semaines dans la Manche. Plus tard, avec son propre bateau, les distances se sont allongées. Lors d'une traversée de l'Atlantique, il a fait naufrage. Mais cela ne l'a pas empêché de naviguer dans les mers du Sud.

Pierre-André Huglo lors du lancement de la Longue Route 2024 à Lorient.Photo : LONGUE ROUTE/ Bruno TrécaPierre-André Huglo lors du lancement de la Longue Route 2024 à Lorient.

La première fois dans les mers du Sud

Frédéric Switala55 ans, n'est pas seulement un passionné de voile, il en fait aussi son gagne-pain. Ce Français vend des voiliers spécialement équipés pour les tours du monde à la voile. Il a lui-même déjà traversé l'Atlantique à plusieurs reprises et navigué jusqu'en Polynésie. Toutefois, il n'a encore jamais navigué sur sa propre quille dans les mers du Sud, comme il l'explique dans une interview. Cela devrait changer avec sa participation à la Longue Route.

Frédéric Switala dans le cockpit de son "Man of War".Photo : LONGUE ROUTE/ Bruno TrécaFrédéric Switala dans le cockpit de son "Man of War".

Non-stop avec escales

Aussi Alfonso Pascual60 ans, fait partie des navigateurs au long cours expérimentés. Pendant trois ans, il a navigué seul à bord d'un Fantasia. En 2017, il a navigué avec sa famille de la France à l'Argentine. Le Français a environ 60 000 miles nautiques dans son sillage et a souvent suivi les routes des grands navigateurs. Il a ainsi navigué sur la route d'Ulysse à bord d'un Mini 6.50 à travers la Méditerranée. Actuellement, il s'oriente vers les chemins de Moitessier.

Sur son "Cyrano", Alfonso Pascual a pris le départ à Lorient pour la Longue Route de cette année.Photo : LONGUE ROUTE/ Bruno TrécaSur son "Cyrano", Alfonso Pascual a pris le départ à Lorient pour la Longue Route de cette année.

Le seul duo de la Longue Route

Eymeric Maiffredy46 ans, est le seul à ne pas être parti seul. Il est accompagné de son chat "Maus". Il possède en outre une grande expérience des océans : Au total, il a participé à six courses transatlantiques, dont certaines en solo. Dans sa jeunesse, il a également fait partie de l'équipe technique d'Yves Parlier - un navigateur français, plusieurs fois participant à la Vendée et vainqueur de la Transat Jacques Vabre.

À 46 ans, Eymeric Maiffrédy est le plus jeune participant de la Longue Route 2024.Photo : LONGUE ROUTE/ Bruno TrécaÀ 46 ans, Eymeric Maiffrédy est le plus jeune participant de la Longue Route 2024.

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