Ni les deux leaders Charlie Dalin et Yoann Richomme, ni leur groupe de poursuivants allant de Thomas Ruyant, quatrième, à Justine Mettraux, onzième, n'ont actuellement la vie facile à bord. Alors que la tête de course, largement distancée, est toujours coincée dans une vaste zone anticyclonique, derrière, on se bat depuis des jours pour chaque mille dans un vent de plus en plus instable et une grosse vague rugueuse.
Désormais, une dépression orageuse menace, avec des vents atteignant 40 nœuds. Le Français Thomas Ruyant a déjà été pris dans une rafale de plus de 50 nœuds hier, ce qui pourrait avoir des conséquences importantes pour la suite de la course. Son "Vulnerable" s'est couché sur la joue, son J2 s'est déchiré. La voile d'avant d'environ 100 m² avait été indispensable les jours précédents. "Il reste encore quelques mètres carrés en lambeaux. C'est la première fois que je vois ça. Il y avait environ 20 nœuds, puis le vent s'est soudainement levé. Je ne l'ai pas vu venir. Il s'est transformé en tornade. Elle a duré deux heures, avec 45 à 60 nœuds !", a écrit l'homme de 43 ans. Actuellement, il est en quatrième position, environ 160 milles devant son premier poursuivant, Paul Meilhat.
Devant lui, le troisième, Sébastien Simon, victime d'une rupture de foil, longe la côte brésilienne, tandis que le duel Richomme-Dalin semble sans fin. Dalin a toutefois réussi à prendre un peu d'avance au cours des dernières 24 heures. Alors que "Paprec Arkea" a parcouru 145,6 milles nautiques, le leader a tout de même pu enregistrer 173,5 milles. "Je ne me plains pas, et nous devrions aller plus vite aujourd'hui et avoir un peu plus de vent. Les alizés devraient se renforcer au cours de la journée alors que nous naviguons vers le nord en direction de l'équateur", a déclaré Dalin.
Ces derniers temps, les vents n'ont pas seulement été assez faibles pour les deux premiers favoris, ils ont surtout été très inconstants. Le skipper de "Macif Santé Prévoyance", Charlie Dalin, n'a "jamais navigué avec des variations de vent aussi importantes et rapides". Grâce aux conditions légères, avec jusqu'à 33 degrés, il a néanmoins été facile de dormir. Dans la lutte pour la victoire du 10e Vendée Globe, cela devrait être tout à fait positif pour le quadragénaire, en plus de sa position actuelle.
Il en va tout autrement pour Boris Herrmann, qui doit faire face à une mer inconfortable dans le peloton de chasse. "Nous avons un vent de face depuis les Malouines, et ce n'est pas très agréable, surtout maintenant que la mer s'est formée, ça claque fort, parfois on a un peu peur pour le bateau !" Le groupe composé de Sam Goodchild, Jérémie Béyou et Nicolas Lunven s'attend bientôt à une tempête avec des vents pouvant atteindre 40 nœuds. "J'espère que nous pourrons en sortir sans devoir mettre le foc de tempête ! Ensuite, nous devrions passer au centre de la dépression, même si l'on ne sait pas vraiment par quelle route, et ensuite nous progresserons vers le nord, mais ce n'est pas facile", explique le skipper de "Malizia-Seaexplorer".
Actuellement en neuvième position, l'Allemand, fatigué par de nombreuses manœuvres, s'attend encore à quelques jours de conditions météorologiques incertaines et à des décisions peut-être importantes. Paul Meilhat a déjà réussi à s'échapper du petit groupe de poursuivants. Boris Herrmann l'a confirmé : "Paul (Meilhat) nous a lâchés, il a fait un super boulot. Nous étions tous, enfin moi, sceptiques quant au tracé, c'est pourquoi je n'ai pas pris cette route ! Mais c'était une erreur quand on y pense" !
Une place derrière, Justine Mettraux est la première femme du classement actuel, à la dixième place. La Suissesse semble vouloir entamer une petite course de rattrapage à l'issue incertaine avec sa route actuelle à l'ouest de la dépression. Elle est suivie à la hauteur des Malouines par Benjamin Dutreux, Clarisse Cremer et Sam Davies, qui ont encore beaucoup de retard. Romain Attanasio sur l'ancien "Malizia - Seaexplorer" et Damien Seguin sur son "Groupe Apicil" ont passé le cap Horn ce matin. Mais plus de la moitié de la flotte est encore derrière la fameuse pointe. Le dernier du classement, le Belge Denis Van Weynbergh, a même 7 361 milles de retard sur Charlie Dalin, qui doit encore parcourir 4 000 milles avant la ligne d'arrivée.