Sur la grande majorité des voiliers, la journée commence et se termine au moteur. Mais celui-ci peut faire défaut. Les dériveurs n'en ont pas du tout, les équipages des petits quillards laissent le moteur hors-bord au ponton pendant les régates et même certains bateaux de 12 mètres de long ne sont pas équipés d'un moteur par leurs propriétaires ambitieux pour des raisons de performance.
Mais si un yacht de croisière tout à fait normal entre dans le port sans moteur, tout le monde se précipite comme si un épisode du cinéma portuaire venait de commencer, dont l'issue peu réjouissante est prévisible. Pour beaucoup, il est inimaginable qu'il s'agisse d'une manœuvre volontaire.
C'est ainsi que s'expliquent les messages radio demandant une aide au remorquage en cas de panne de moteur. En raison d'une panne de moteur ? Qu'est-ce qui se passe avec les voiles ? Est-ce vraiment si compliqué d'accoster et d'appareiller avec un yacht de croisière de taille moyenne sans assistance moteur ?
La réponse est oui et non.
Si l'équipage est pris à froid par un tel scénario et qu'il ne s'est jamais entraîné aux manœuvres correspondantes, cela peut, en combinaison avec des conditions météorologiques défavorables, lui donner des cheveux blancs. En revanche, ceux d'entre nous qui s'entraînent régulièrement à ce genre de manœuvres pour des raisons de sécurité, par simple plaisir ou même pour s'attirer quelques regards appréciateurs dans le port suivant, ne se sentent pas concernés par une panne de moteur.
Les principes à suivre pour effectuer les manœuvres typiques d'un port sont expliqués ci-dessous. Cela devrait permettre à ceux qui n'ont pas encore abordé le sujet de réussir l'exercice.
Il est souvent plus facile de larguer les amarres que de s'amarrer, et plus facile de s'amarrer en long qu'en large. Si le bateau n'est pas trop près du quai ou de la jetée et que l'avant est au vent, il ne faut surtout pas laisser passer l'occasion de larguer les amarres pour la première fois sous voile. Avec un vent de face et beaucoup de mou dans les écoutes, il est possible de hisser la voile d'avant et la grand-voile sans que le bateau ne veuille tout de suite se déplacer.
Une fois les voiles levées, les amarres sont larguées. Le dernier point d'amarrage est le pont arrière qui se trouve sur la cale. Il suffit maintenant de poser le bout-dehors pour que le bateau, bien arrimé à l'arrière, se rabat sur le ponton. Les écoutes sont ensuite serrées et la poupe récupérée.
Ce serait un bon exercice de toujours gérer ce genre de situations simples de cette manière. Cela permet de prendre confiance en soi pour les tâches plus difficiles. Pour ceux qui trouvent que c'est trop stressant, il est conseillé de laisser le jockey se déplacer sans le débrayer. Cela crée une sécurité mentale et n'a aucune influence sur l'effet d'apprentissage de la manœuvre.
Ce n'est pas non plus un problème, à condition que le bateau soit placé dans le box, l'étrave au vent. Les amarres de poupe sont remontées, les amarres d'avant sont mises en slip et mises en place jusqu'à ce que l'une d'entre elles puisse être placée sur l'un des haubans de poupe. Le bateau est maintenant accroché à une amarre de tête et s'oriente de manière autonome exactement contre le vent. L'idéal est de s'accrocher à la dunette de tribord si l'on veut ensuite naviguer à bâbord, et inversement.
Dans cette situation, les voiles sont à nouveau réglées avec beaucoup de mou dans les écoutes. Le foc doit être relevé plus tard pour la navigation, les écoutes sont donc déjà occupées en conséquence. L'écoute de la grand-voile reste pour l'instant libre. Si l'on veut maintenant naviguer à bâbord de la voie des stands, on tire le bateau vers l'avant par l'amarre d'avant qui se trouve sur le slip jusqu'à ce que l'étai se trouve sur le côté tribord de l'étrave.
Il s'agit maintenant de tirer le bout d'amure et de pousser courageusement l'étrave vers bâbord en s'appuyant sur le piquet tribord. La voile d'avant étant à l'envers, le bateau tourne plus ou moins sur place à bâbord, mais n'avance pas. Si la voie des stands se trouve devant l'étrave, il suffit d'affaler le foc, d'étarquer la grand-voile et le bateau navigue à mi-vent hors de la voie.
Le point critique est le moment où le bateau est poussé par l'étai. Il faut générer un mouvement de rotation, il ne faut en aucun cas revenir dans le box ou même naviguer dans le box voisin. En effet, si un bateau se trouve là, les regards appréciateurs des voisins disparaissent rapidement. C'est pourquoi la personne qui pousse le bateau à l'avant reste dans cette position jusqu'à ce qu'il soit clair que l'on est vraiment libre de tout autre piquet et que l'on peut naviguer droit devant dans l'allée.
Ce type de dépôt présente de nombreux avantages. Toutes les tâches sont déjà effectuées lorsque l'on est encore à quai. Les défenses, les lignes et les gilets de sauvetage, tout est prêt à naviguer lorsque l'on quitte le port. Ce sont surtout les navigateurs en solitaire qui en profitent. Plus personne n'a besoin de s'agiter sur le bateau lorsqu'il est en mouvement, il n'est même pas nécessaire d'avoir un pilote automatique. Il en résulte même non seulement un gain de sécurité, mais aussi un gain de temps.
Si la direction du vent ne correspond pas à la dérive prévue, il est judicieux de déplacer le yacht vers une autre amarre ou un ponton où le vent est offshore. De là, la manœuvre est effectuée comme décrit. S'il n'y a pas de moteur disponible, parce qu'il n'existe pas ou qu'il est défectueux, une telle manœuvre peut s'avérer plus difficile que l'appareillage proprement dit. Si le bateau est par exemple dans un box avec un vent arrière, on peut, si l'équipage est disponible, essayer de mettre le bateau devant les piquets pour le pousser ensuite le long de ceux-ci et ainsi accélérer. Une fois que le bateau a pris de la vitesse et que le gouvernail a fait son effet, il faut hisser la voile d'avant et partir.
Toutefois, si le yacht est trop lourd ou l'équipage trop petit pour une telle mise à l'eau, cette manœuvre n'est pas adaptée. Dans ce cas, une amarre à l'opposé de la voie des stands est utile. Elle permet de déplacer le bateau de l'autre côté, où l'on retrouve les conditions idéales décrites au début.
Lorsqu'il s'agit de faire passer la ligne par la large voie des stands, il faut faire preuve de créativité. Si l'eau est chaude, la natation peut convenir, si elle est plus fraîche, le SUP ou l'annexe peuvent être utilisés. Si rien de tout cela n'est disponible, il suffit d'utiliser le vent et de lancer la ligne dans l'eau depuis le ponton d'en face, attachée à un pare-battage. Il ne reste plus qu'à attendre qu'elle dérive et qu'elle puisse être repêchée avec une gaffe.
Partir à la voile signifie donc toujours que la première chose à faire est de placer le bateau dans une position appropriée, ce qui peut parfois être un défi et s'avérer beaucoup plus compliqué que la manœuvre de départ elle-même. Avec l'aide des lignes, du vent, du courant et surtout des idées et de la créativité, ce qui semblait impossible devient possible. Et ce n'est pas le moindre des plaisirs.
Trouver une place d'amarrage dans le port sous voile est un défi bien plus difficile à relever. Pour réussir cette manœuvre, il faut être capable d'immobiliser le bateau sans utiliser le moteur comme frein, et de préférence avec précision. Les bateaux peuvent réagir très différemment à ces manœuvres. Un bateau lourd et profond à quille longue ne se comporte pas du tout de la même manière lorsqu'il s'agit de s'arrêter qu'un bateau moderne à carène plate et à quille courte. Il faut donc déterminer exactement quelle stratégie fonctionne pour son propre bateau. Cela n'est pas possible dans tous les ports. Dans certains endroits, c'est indésirable, dans d'autres, on se réjouit d'un changement dans le cinéma quotidien du port.
C'est pourquoi il faut commencer par s'exercer à une poussée contrôlée. L'objectif est de développer un bon feeling pour savoir jusqu'où le bateau peut dériver avec des écoutes relâchées ou même simplement devant le top et le gréement. C'est surtout le vent, qu'il vienne de l'avant, de l'arrière ou du côté, qui rend la manœuvre différente à chaque fois. Avant le premier accostage sans moteur, il est conseillé de s'entraîner à la manœuvre d'étrave par vent et courant faibles. Les experts en manœuvres MOB sont déjà entraînés et ont donc un avantage, mais ces manœuvres ont généralement lieu en mer libre. En revanche, l'accostage sous voile ne peut se faire que dans le port, qui est généralement assez étroit.
La poussée est réussie lorsque le yacht a perdu de la vitesse au point souhaité. Si le bateau est trop court ou trop loin, il faut trouver des stratégies pour résoudre le problème. Si le bateau est trop rapide, les virages en S peuvent aider à allonger la distance restante et à générer du temps supplémentaire. Le fait d'alterner les coups de barre à bâbord et à tribord permet de couper le courant et agit ainsi comme un frein efficace. En cas de vent de face, le bateau peut être stoppé par la grande voile tenue à l'arrière, qui constitue une énorme résistance. La gaffe jetée par-dessus bord, fixée à la longue estrope sur l'un des taquets arrière, agit également comme une ancre flottante et constitue donc un moyen éprouvé de ralentir le bateau.
Lorsque le bateau passe devant une rangée de piquets, il est possible de prendre de la vitesse à l'aide d'une amarre. Il faut toutefois tenir compte de l'énergie résiduelle élevée dont dispose encore un bateau, même lent. C'est pourquoi la ligne n'est pas tirée à la main, mais par l'intermédiaire d'un taquet.
La situation est totalement différente lorsque le bateau n'est plus en mouvement avant même d'avoir atteint sa destination. Sur les petits bateaux, on peut se débrouiller en s'agitant avec le gouvernail ou la courroie. On peut aussi se servir d'une pagaie. Mais pour les bateaux plus grands, qui déplacent plusieurs tonnes, cela ne suffit pas. Dans de telles situations, l'aide de la terre ferme est un véritable atout. Un membre de l'équipage équipé d'une corde de lancer peut essayer d'établir une liaison avec le ponton ou avec le futur amarrage voisin.
La première vraie manœuvre suit la poussée. Comme précédemment lors de l'appareillage, un ponton dégagé avec le vent en parallèle s'impose. Si les conditions exigent par exemple un amarrage à bâbord, le bateau est préparé comme suit : Toutes les défenses existantes sont déployées à bâbord. Au moins deux très grandes défenses sphériques, placées à mi-chemin entre le milieu du bateau et les extrémités, s'avèrent ici très utiles. Ensuite, une ligne est placée sur le taquet central et prête à être lancée. En outre, une amarre d'avant est attachée et prête à être utilisée. Si les conditions sont telles qu'en cas de doute, le bateau peut courir à quelques degrés de hauteur avec seulement la voile d'avant, on peut se passer de la grand-voile. Une toile de moins avec laquelle il faut travailler permet de disposer de capacités supplémentaires.
Maintenant, c'est parti ! Par sécurité, le moteur peut tourner au ralenti lors d'un exercice, mais ce n'est vraiment pas nécessaire pour cette manœuvre. En outre, le sentiment de réussite est incomparablement plus grand si l'on se faufile jusqu'au ponton en faisant quasiment silence. On se dirige vers le ponton avec un angle assez obtus d'environ 70 à 80 degrés, donc presque avec la moitié du vent. La vitesse est contrôlée par l'écoute de foc. C'est maintenant l'accélérateur. Si on l'affale, cela signifie moins de propulsion. Si l'on continue à l'affaler jusqu'à ce que le foc soit complètement déroulé, il n'y a plus de propulsion du tout. Si l'on resserre l'écoute, le bateau reprend de la vitesse.
De cette manière, l'approche du ponton se fait aussi rapidement que nécessaire pour l'action du gouvernail, mais aussi lentement que possible. Deux à trois mètres avant le ponton, l'écoute est complètement larguée avec un minimum de navigation restante et le gouvernail est placé de manière à ce que le bateau soit parallèle au ponton. Dans l'idéal, on s'arrête avec le taquet central à hauteur d'une borne d'amarrage sur le ponton. Il suffit alors de poser un œil par-dessus, de serrer l'amarre, de l'occuper et on est d'abord amarré. La combinaison d'une amarre très courte au milieu du bateau et de deux grandes défenses sphériques à une certaine distance à gauche et à droite empêche le bateau d'entrer en contact avec l'avant ou l'arrière du ponton.
Si la manœuvre échoue parce que l'on est trop rapide, il suffit de s'éloigner du ponton, de serrer le foc à tribord et de repartir pour une deuxième tentative. Si l'on est trop lent pendant l'approche, ce qui est plutôt rare dans la situation décrite, la proue se rabat sur bâbord. Dans ce cas, on peut s'éloigner du ponton après un empannage et se préparer à une nouvelle approche. Cette manœuvre d'amarrage devrait toujours être pratiquée, car elle nous prépare parfaitement pour tous les autres et nous donne confiance en nous.
La prochaine étape, pour laquelle il est conseillé de faire tourner le moteur au début, est de naviguer dans le box. Bien sûr, on s'y exerce d'abord dans son port d'attache. Ici, on connaît les conditions et on sait que son propre box est libre. L'idéal pour s'entraîner est que la voie des stands ne soit pas trop étroite et que des lignes de vie soient tendues dans les stands entre les haubans et le ponton. Le vent doit être faible et venir d'une direction qui permette d'accoster avec un léger vent arrière.
Le bateau est préparé comme s'il était amarré à la machine. Deux amarres d'avant sont placées sur les taquets avant et sont prêtes à être lancées. Il en va de même pour deux amarres de poupe, chacune avec un gros œil de palangre, pour les placer sur les piquets de poupe. Deux grandes défenses sphériques sont accrochées à bâbord et à tribord à l'avant du bateau. Comme le bateau est ici très étroit, ils ne gênent pas lors du passage des haubans. Si le bateau dérive en direction de la rive voisine, elles évitent les dégâts. Toutes les autres défenses sont nouées au bastingage, mais restent sur le pont pour pouvoir les déployer si nécessaire.
Si l'espace le permet, la manœuvre est lancée dans le prolongement de la voie des stands. Il est alors possible d'avoir une vue d'ensemble de la zone avant d'y entrer. Si un autre bateau se prépare à partir, il faut encore faire un ou deux tours d'attente afin d'éviter les rencontres critiques dans les endroits étroits. La vitesse devrait être réduite à temps. Si cela ne fonctionne pas, il est possible d'interrompre la manœuvre avant d'entrer dans la voie des stands.
Comme pour l'amarrage en long, on réduit la vitesse au strict minimum en laissant la voile d'avant s'affaler. L'idéal est de rester quasiment immobile à une position presque transversale par rapport au box dans lequel on veut entrer. Si l'on baisse la voile d'avant, la proue tourne dans le box. Pendant cette rotation, le foc tombe ou s'enroule. Le vent fait le reste. Mais il est important - ce qui ne différencie pas une manœuvre à la voile d'une manœuvre au moteur - qu'au moins une des amarres arrière soit placée au-dessus d'un piquet, car cela permet d'arrêter le bateau devant le ponton.
Toutes les manœuvres qui se terminent par un vent arrière ne devraient être effectuées qu'avec la voile avant. La grand-voile tombe d'autant plus mal que le vent est arrière et ne peut pas, de par sa construction, s'orienter vers l'avant. Dans le cas décrit, le bateau accélérerait donc dans le box, ce qu'il faut éviter. Il en irait autrement s'il fallait accélérer dans le box. En particulier si le vent est si faible que l'on craint de mourir de faim dans le couloir, on peut très bien naviguer avec la grand-voile.
Et c'est précisément ce qui compte : analyser chaque situation et évaluer correctement ce qui va se passer et où. C'est, outre l'exercice pratique, la clé du succès. Bien sûr, cette réflexion peut aussi révéler qu'il est impossible d'entrer au port à la voile dans les conditions qui prévalent. Dans ce cas, il faut prévoir un plan B.
Tous les bateaux visés par cet article devraient avoir une ancre à bord. Il est souvent possible de jeter l'ancre sous le vent d'un port ou, mieux encore, dans l'avant-port. Là, on attend que les conditions s'améliorent ou on fait appel à l'aide du remorqueur, voire de son propre canot. Les douze bateaux sans moteur mentionnés plus haut font de même lorsque les conditions ne permettent pas de manœuvrer à la voile dans un port. Car il convient de préciser ici qu'il n'est pas de mauvaise pratique de faire appel à une aide extérieure dans de telles situations. Au contraire, si l'on craint de se mettre soi-même, les autres ou le bateau en danger lors d'une manœuvre, l'aide extérieure est même le moyen le plus approprié.
Pour ceux qui, à l'avenir, s'intéressent de plus près aux manœuvres de port à la voile, une panne de moteur ne devrait bientôt plus être une urgence. Dans le meilleur des cas, elle sera même considérée comme un défi sportif pour amener le bateau à bon port. Une fois l'opération réussie, l'équipage sera fier, à juste titre.